Balises pour les comités de programme

 

Un bref historique

 

Le 14 mars dernier, Jonathan Leblanc, conseiller syndical à la FNEEQ-CSN, venait nous présenter le regard que porte la FNEEQ sur les comités de programme (CP). Avant de relater les éléments les plus importants de sa présentation, voici un petit historique local du dossier.

 

La réforme de l’enseignement collégial de 1993 a instauré la réalité des CP. Comme cette instance ne figurait pas à notre convention collective (CC) à ce moment, les CP ont été formés à géométrie variable dans le réseau. Il a fallu la CC de 2000 à 2002 pour voir apparaître une formalisation conventionnée de l’instance. On y définissait alors, avec toute la clarté que l’on reconnait depuis toujours à nos CC, la composition, le processus électif et le mandat des CP. C’est à cette époque (en 2001 précisément) que notre Exécutif a conclu une entente locale avec la partie patronale, entente définissant encore plus précisément les trois éléments susmentionnés prévus dans la CC en vigueur. Cette entente avait pour échéance l’année 2002. Depuis, aucune autre entente locale n’a été conclue entre les parties sur ce sujet.

 

À compter de 2002, l’entente locale échue, non renouvelée et non modifiée, les CP ont pour la plupart évolué en fonction de l’usage mis en place avec l’entente de 2001, mais d’autres ont lentement bifurqué de la voie tracée pour modifier la composition prévue et moduler le droit de vote, si bien qu’aujourd’hui, nous nous retrouvons avec des CP comprenant des membres externes ayant le droit de vote, d’autres où on limite le vote des disciplines de la formation générale (FG), d’autres encore où la direction adjointe aurait un droit de vote… À ce joyeux mélange s’est ajoutée la demande (tout à fait pertinente selon nous) faite aux CP par la Direction des études (DÉ) de mettre à jour (ou littéralement d’écrire, dans certains cas) leurs règles de régie interne. Certains CP ont vu là une opportunité en or de mettre sur pied le CP rêvé… parfois au détriment de la CC.

 

Constatant l’évolution chaotique du dossier, le SEECO a demandé un moratoire sur la question, demande à laquelle la DÉ a donné suite. Pour l’instant, et tant que les enseignantes et les enseignants ne se seront pas entendus, les parties s’entendent pour n’effectuer aucun changement. C’est le statu quo jusqu’à nouvel ordre.

 

De certains principes

 

-        Les dispositions prévues à l’article 4-1.02 définissant le CP ne peuvent pas être modifiées ni faire l’objet d’ententes locales.

 

-        Seule la CC des enseignants prévoit cette instance et la définit ; l’esprit en est donc que cette instance est celle des enseignantes et des enseignants.

 

-        Le CP est par conséquent une instance où se pratique notre autonomie professionnelle.

 

-        La recherche de consensus devrait primer dans la prise de décision.

 

-        Les dispositions qui ne figurent pas à la lettre ni à l’esprit de la CC relèvent du droit de gestion de la partie patronale.

 

De l’article « 4-1.02 Comité de programme » lui-même

 

Cet article étant relativement long et les éléments controversés en étant relativement restreints, nous ne reprendrons ici que les éléments jugés importants à la réflexion :

 

a)        Les parties conviennent qu’un comité de programme est formé pour chacun des programmes menant au DEC que le Collège offre. Le comité comprend des enseignantes et enseignants des disciplines participantes au programme. Le comité peut aussi comprendre des membres des autres catégories de personnel. […]

 

Elles ou ils agissent à titre de représentantes ou de représentants de leur département ou de leur discipline, selon la composition du comité de programme.

 

b)        Ce comité a pour mandat de :

 

définir ses règles de régie interne […]

 

Revenons-y à la pièce.

 

La première phrase (« Les parties conviennent qu’un comité de programme est formé pour chacun des programmes menant au DEC que le Collège offre. ») ne pose aucun problème de compréhension ou de mise en œuvre chez nous. Chaque programme a son CP. Le Cégep met aussi en place des CP provisoires lorsque de nouveaux programmes sont en élaboration et cette pratique n’a pas été remise en question.

 

En revanche, lorsque les parties affirment que « [l]e comité comprend des enseignantes et enseignants des disciplines participantes au programme », les interprétations et les pratiques divergent. Le sondage interne mené à l’automne 2017 fait ressortir que les disciplines spécifiques (porteuses et contributives) sont généralement toutes représentées. Cette situation nous paraît tout à fait conforme à la CC. Pour leur part, les disciplines porteuses bénéficient souvent d’au moins un deuxième siège étant donné l’importance autant qualitative que quantitative qu’elles représentent dans le programme. Nous estimons aussi ce cas comme étant conforme. Cette réalité n’a d’ailleurs jamais été contestée. Le bât blesse toutefois dans le cas des disciplines de la formation générale. En effet, si les CC d’avant 2000 permettaient de conclure une entente locale et que cette entente restreigne la représentativité de la FG, la situation n’est plus la même. Il faut considérer chaque discipline de la FG comme une discipline en soi au même titre que les disciplines spécifiques. D’ailleurs, le Règlement sur le régime d’études collégiales (RREC) ne fait aucune distinction entre ces trois catégories de disciplines outre le fait que les disciplines de FG sont offertes dans tous les programmes. Ainsi, le CP ne peut aliéner à une ou des disciplines sont droit prévu à y occuper un siège. Tout au plus, la précision du conseiller publiée après sa présentation permet-il aux départements de FG d’alléger leur fardeau de représentation : « Toutes les disciplines participantes doivent effectivement avoir une présence au comité, c’est-à-dire y être représentées. Il y a une pratique dans différents collèges où les disciplines de la formation générale se partagent la responsabilité des différents comités de programme[1] ». Cette décision ne relève pas de la régie interne du CP mais de celle des départements concernés. Nous approfondirons cette question plus loin.

 

Par ailleurs, la CC établit également que le « comité peut aussi comprendre des membres des autres catégories de personnel. » Cette simple phrase implique un certain nombre de dispositions. D’une part, il est ici question des catégories de personnel du collège, non pas de la communauté externe. D’autre part, comme on parle de personnel, on exclut la communauté étudiante. Enfin, contrairement à la croyance répandue, il n’appartient pas au CP de décider de sa composition, même à l’intérieur de ces paramètres. En fait, la décision de l’inclusion des autres catégories représentées peut s’exercer de façon unilatérale par l’employeur, tant que celui-ci respecte les deux provenances : les enseignantes et les enseignants et les autres catégories de personnel. Par ailleurs, cette décision peut aussi faire l’objet d’une entente locale. En ce qui concerne le droit de vote des autres catégories de personnel, il relève de la régie interne, laquelle est une responsabilité du CP.

 

Au sujet du rôle des enseignants, la CC dit ceci : « Elles ou ils [les enseignantes et les enseignants] agissent à titre de représentantes ou de représentants de leur département ou de leur discipline, selon la composition du comité de programme. » L’affirmation semble sans équivoque. Si une certaine confusion existe au Cégep de l’Outaouais, on peut assurément l’attribuer à l’entente locale de 2001 et à l’usage qu’elle a installé. En effet, les disciplines de la formation générale ayant droit à cette époque à un minimum de deux sièges à chacun des CP, les départements d’éducation physique, de français, de langues et de philosophie se sont souvent contentés de ce minimum en raison du grand nombre d’effectifs requis pour que chaque discipline de la FG soit représentée sur chacun des CP. Dans ces cas, la représentation départementale est devenue une responsabilité partagée entre les départements de la FG. Or, aujourd’hui, l’augmentation du nombre de profs dans ces disciplines a facilité l’intégration de plus de deux départements de FG sur bien des CP.

 

La question des règles de régie interne est elle aussi empreinte d’une certaine confusion qu’il vaut mieux tenter de dissiper. Bien que la CC établisse qu’il appartient au CP de « définir ses règles de régie interne », elle reste muette sur une quelconque définition du concept même de régie interne. Si notre façon de faire institutionnelle nous permet d’en avoir une certaine idée, la FNEEQ nous rappelle que ces règles peuvent régir le droit de vote (nombre de sièges, vote prépondérant), les règles de déroulement d’assemblées, les règles de prise de décision et les rôles et responsabilités des membres. Remarquons donc que la composition ne fait pas partie des éléments modifiables par le CP lui-même, celle-ci relevant de la convention collective et du droit de gestion de l’employeur.

 


 

Tentative de synthèse :

 

Ce qu’on doit ou peut faire

 

-        Chaque programme a son CP.

-        Chaque discipline ayant des cours au programme doit être représentée.

-        La discipline porteuse peut nommer deux personnes représentantes ou avoir un vote prépondérant (cette décision est prise par le CP dans le cadre des règles de régie interne).

-        Les disciplines de FG et contributives peuvent se partager leur présence aux CP en y étant représentée par délégation de responsabilité (ce sont souvent les disciplines de FG qui le font).

-        Chaque discipline présente a le droit de vote.

-        La recherche de consensus devrait être priorisée.

-        Chaque CP peut compter des membres d’autres catégories de personnel (la décision de leur inclusion et des catégories représentées peut s’exercer de façon unilatérale par l’employeur, mais peut aussi faire l’objet d’une entente locale).

·     Par « catégories de personnel », on entend le personnel de soutien (techniciennes et techniciens), le personnel professionnel (aide pédagogique individuelle, conseillère pédagogique), les cadres et les hors-cadres.

·     La nomenclature « catégories de personnel » exclut les étudiantes et les étudiants ainsi que les gens de la communauté externe au Cégep (ceux qu’on appelle souvent les « partenaires du milieu ») ; ceux-ci peuvent toutefois être invités à participer aux discussions sans par contre avoir le droit de vote.

·     Les membres d’autres catégories de personnel peuvent avoir le droit de vote, selon la volonté du CP.

-        Les enseignantes et les enseignants agissent à titre de représentantes ou de représentants de leur département ou de leur discipline (sauf dans les cas de délégation de responsabilité).

-        Le CP est responsable de décider de ses règles de régie interne.

-        Par régie interne, on entend

·     Le droit de vote (nombre de sièges, vote prépondérant)

·     Les règles de déroulement d’assemblées

·     Les règles de prise de décision

·     Les rôles et responsabilités

 

Ce qu’on ne peut pas faire

 

-        Aucune instance ne peut donner le droit de vote aux étudiants et aux « partenaires du milieu ».

-        Le CP ne peut modifier sa composition en dehors de ce que permet la CC.

 



[1] Communication en vrac du SEECO du 15 mars 2018.